Le Bail Réel Solidaire, un outil majeur pour l’efficacité de la dépense publique
Publié le 6 juin 2023
La situation critique du logement, sur la production comme pour l’accès des ménages, est fortement portée dans le débat public, aussi bien par les associations, les bailleurs sociaux que par les professionnels du bâtiment et de l’immobilier, qui en appellent à l’Etat.
Dans une récente interview accordée à Challenges, le Président de la République Emmanuel Macron, soulignait quant à lui que l’« on a créé un système de surdépenses publiques pour de l’inefficacité collective », ajoutant : « Cette économie mixte n’est pas efficace » et « on ne peut tout attendre de la réforme gouvernementale ». Le fossé semble important. Pour autant, les acteurs du secteur dans leur diversité se sont mobilisés dans le cadre des travaux sur le logement menés par le Conseil National de la Refondation pour porter des propositions communes. L’une d’entre elle nous semble, à Espacité, pouvoir réconcilier les points de vue par l’efficacité de la dépense publique qu’elle permet.
Une proposition ambitieuse du CNR sur la mobilisation du BRS
Le groupe de travail « pouvoir habiter » a formulé une proposition qui consiste à proposer 100 000 logements en Bail réel solidaire (BRS) en 2 ans, obtenus de différentes manières : acquisition de 50 000 passoires énergétiques à des bailleurs privés et leur transformation en logements vendus rénovés à des ménages, substitution du BRS au PSLA, vente HLM uniquement en BRS et rachat de 20 000 logements neufs à des promoteurs sur des opérations en difficulté. Alors que quelques milliers de logements par an sont aujourd’hui commercialisés sous cette forme spécifique de propriété, ce changement d’échelle peut paraître ambitieux.
Ce serait pourtant un moyen de réellement influer sur l’offre de logement (de l’ordre de 5% des transactions annuelles), avec une garantie de pérennité des financements publics apportés, que ce soit via la mise à disposition de foncier, des subventions publiques ou la TVA à taux réduit. En effet, le BRS, notamment par l’encadrement des prix à la revente qu’il prévoit, permet de s’assurer qu’il n’y aura pas de captation de la valeur produite par l’investissement public. C’est un mécanisme qui contribue sur le long terme à la modération des marchés immobiliers et qui apporte aussi des moyens juridiques pour favoriser la préservation des copropriétés dans la durée.
© Espacité
Le BRS, une forme de propriété comprise par les ménages
Les craintes des ménages par rapport à cette forme particulière d’accession à la propriété ? L’étude que nous avons menée à Espacité à partir de retours d’opérateurs et de particuliers tend à montrer que, si les ménages peuvent accéder à la propriété grâce au BRS, les contraintes du dispositif apparaissent comme des contreparties acceptables.
Un outil à mobiliser lorsqu’il est pertinent
Il ne s’agit pas de « faire du BRS pour faire du BRS » : l’une des conditions de réussite est bien que ce montage soit mobilisé lorsqu’il présente un intérêt, qui peut être de rendre le logement plus accessible pour le ménage, mais qui peut aussi porter sur d’autres avantages, notamment du point de vue des acteurs publics (comme la sanctuarisation de l’occupation à titre de résidence principale ou de la minoration foncière apportée).
Un accès au financement à faciliter pour les OFS
Une deuxième condition essentielle du développement du BRS est que les OFS puissent mobiliser des crédits de long terme dans des conditions facilitées (pas uniquement en termes de coût de la ressource, mais aussi de visibilité sur les modalités et d’articulation de celles-ci avec les spécificités du BRS), voire que des solutions de financement alternatives à celles existantes se développent.
Une responsabilité des OFS pour la gestion dans la durée
Enfin, une troisième condition essentielle est de faire en sorte que les BRS soient portés par des Organismes de Foncier Solidaire (OFS) disposant des conditions professionnelles et matérielles nécessaires à leur bon fonctionnement, à la mise en place des opérations, mais aussi à leur portage dans la durée, en veillant aux enjeux de gestion économique, financière et patrimoniale.
Une nécessité de portage politique renforcé
Le Bail Réel Solidaire n’est pas une solution « magique » capable de répondre à toutes les difficultés de logement en France mais elle présente des atouts indéniables, notamment en termes d’efficacité de la dépense publique. En bénéficiant d’un soutien politique renforcé, elle pourrait représenter une part significative des transactions en France et avoir un réel impact pour contribuer à apporter des réponses à court terme, mais aussi à plus long terme, aux difficultés de logement, et à éviter « une bombe sociale ».