Loi Climat et Résilience sur les passoires énergétiques : définir une stratégie globale sur le parc privé
Publié le 26 janvier 2023
Adoptée à l’été 2021, avant la hausse des coûts de l’énergie que nous connaissons à l’heure actuelle, la loi Climat et Résilience prévoit l’interdiction progressive de la mise en location des biens les plus énergivores, à partir du 1er janvier 2025 pour les biens avec un Diagnostic de Performance Energétique G et du 1er janvier 2028 pour les biens classés F (2034 pour les biens classés E). Le parc concerné est très important : 5.2 millions de logements occupés à titre de résidence principale, soit 17%, sont classés F ou G, et donc considérés comme des passoires énergétiques. Le parc occupé par des locataires concentre plus de passoires énergétiques : elles représentant près de 20% du parc locatif privé. La mesure prise dans la loi Climat et Résilience vise donc à inciter les propriétaires bailleurs à réaliser des travaux.
Selon les territoires, ce phénomène est plus ou moins marqué, dans la mesure où la performance énergétique est notamment corrélée à l’époque de construction et au type d’habitat. A Paris, 40% des logements sont des passoires, et les 50% sont dépassés pour des villes comme Nanterre ou Epinay-sur-Seine.
Les premières études cherchent à évaluer de tels effets sur les marchés immobiliers mais d’ores et déjà, les professionnels se mobilisent pour demander le report du calendrier prévu. Nous observons, dans le cadre de nos missions, que le consensus autour de l’objectif – améliorer la performance énergétique des logements – ne suffit pas à faire taire les inquiétudes quant à l’impact de cette loi. Le risque de raréfaction de l’offre locative privée dans les zones tendues est le plus fréquemment cité ; la hausse de la vacance, ou encore le décrochage en termes de prix des biens concernés, avec des conséquences possibles sur l’entretien de ces biens et des copropriétés dans lesquelles ils se trouvent le cas échéant, sont également identifiés. Aussi, notre approche propose de prendre en compte les effets induits dans l’ensemble de nos missions.
Le Ministre a annoncé « une feuille de route » en direction des propriétaires bailleurs pour ce début d’année. L’année 2023 sera cruciale pour lancer une dynamique et faire en sorte que cette mesure conduise à une réelle amélioration du parc locatif privé, ainsi qu’à une réduction des charges d’énergie des locataires. Les collectivités locales pourront certainement contribuer à cette mobilisation : certaines se sont d’ailleurs déjà emparées du sujet, comme la Métropole Européenne de Lille. Au-delà des aides financières, l’accompagnement des propriétaires dans les démarches comme la mobilisation d’entreprises pour réaliser les travaux constituent des défis de taille. Cette action pourra à la fois s’articuler et prendre appui sur d’autres mesures ou politiques sur le parc privé, comme la lutte contre la vacance, le développement de l’intermédiation locative, la lutte contre l’habitat indigne, le permis de louer ou encore les dispositifs Anah. C’est ce que nous portons dans le cadre de nos missions en proposant une approche globale des politiques locales de l’habitat. En effet, pour parvenir à mener de façon transverse ces différentes actions, il est plus que jamais nécessaire de définir une stratégie globale sur le parc privé aux échelles territoriales pertinentes selon les territoires et s’inscrivant dans la durée, et prenant en compte les enjeux spécifiques des copropriétés et de l’habitat pavillonnaire.